Novembre, 2022

Succession François Lepage, l'autre collection

jeu03nov(nov 3)11 h 00 minjeu10(nov 10)18 h 00 minSuccession François Lepage, l'autre collectionVente aux enchèresSalons du Trocadéro, 5, avenue d'Eylau 75116 Paris

Détail de l'événement

Vente Succession François Lepage
Photographies du XIXe et XXe siècle
Le 10 novembre 2022 à 18h

C’est probablement l’une des dernières grandes collections de photographie qui sera dispersée aux enchères le 10 novembre prochain sous le marteau de Maître Alexandre MILLON. Une collection muséale diront certains aux vues des trésors qu’elle recèle. 233 lots qui racontent une histoire de la photographie, de ses débuts jusqu’à la période moderne.

Durant près d’un demi-siècle, François Lepage fut une figure discrète du marché de l’art parisien. Au côté de son associé Gérard Lévy, il accumula des milliers d’images et consacra une grande partie de sa vie à valoriser la photographie ancienne notamment auprès des institutions culturelles françaises et étrangères.

Sa collection, constituée au cours de la seconde moitié du XXème siècle, porte les marques d’une culture et d’une sensibilité singulière et étonne tant par la qualité de conservation que par la rareté des épreuves qui la compose. Elle abrite de précieuses épreuves réalisées par les grands pionniers de l’image fixe.

On y découvre une quarantaine de tirages salés et argentiques de Félix NADAR (1820-1910) représentant des hommes et femmes d’arts et de lettres ainsi que deux autoportraits du photographe. Mais la pièce maîtresse de cette vente est incontestablement la photographie de Pierrot à la corbeille de fruits des frères Tournachon. Icône incontestée de la photographie du XIXe siècle, cette épreuve, issue de la série des 15 « Têtes d’expression de Pierrot » est à classer parmi les chefs-d’oeuvre de la photographie primitive.

Il s’agit du meilleur tirage connu et répertorié à ce jour, dépassant de loin les tirages conservés dans les musées nationaux ou internationaux. Cette image a servi à illustrer l’ouvrage « Nadar, les années créatrices : 1854-1860, Paris », Musée d’Orsay, 7 juin – 11 septembre 1994 [et] New York, The Metropolitan Museum of Art, 3 avril – 9 juillet 1995, Réunion des Musées Nationaux (RMN), 1994, planche XII.
Gustave LE GRAY fait également partie des oeuvres remarquable de cette vacation avec notamment « Effet de soleil dans les nuages- océan » de 1856. On y admire également une cinquantaine de tirages salés de John Beasley GREENE (1832-1856) , véritable invitation dans le temps et dans l’espace, le long de la vallée du Nil, à la découverte des sites archéologiques d’Egypte.

L’ensemble exceptionnel de 30 négatifs papier signés Louis Adolphe Humbert de MOLARD (1800-1874) sont ici pour la première fois offerts aux enchères. Membre fondateur de la société française de photographie, Humbert de Molard a documenté aussi bien la vie paysanne que la vie de Paris et ses environs. Les tirages sur papier salés de ces négatifs sont, en grande majorité, conservés dans les plus grands musées américains.

La collection Lepage présente également plusieurs daguerréotypes animaliers que le photographe Louis-Auguste BISSON (1814-1876) aurait réalisé pour la peintre Rosa Bonheur ou encore un important daguerréotype d’Alphonse-Eugène HUBERT (1797-1841) accompagné d’une feuille de travail de recherche de François Lepage. Marie CHAMBEFORT, figure incontournable de l’histoire mondiale des femmes photographes, fut l’une des premières femmes daguerréotypistes françaises active sur le territoire au XIXe. Pionnière dans l’expérimentation du médium et de surcroît « itinérante », elle réalisa de nombreux portraits. Celui que possédait François Lepage servit à illustrer l’ouvrage « Women photographers » de Eugenia Parry Janis, édité par Constance Sullivan, 1990.

Aux côtés de ces noms illustres de la photographie, la collection révèle des signatures plus confidentielles mais non moins essentielles dans l’histoire du médium et de son évolution. Parmi elles, celle d’Alphonse-Eugène DURIEU (1797-1841). Cette figure importante de la photographie en France pratiquait la daguerréotypie et fut président de la Société Française de Photographie. Durieu fréquentait notamment Prosper Mérimée dont il fit le portrait en 1850 avec à ses pieds une peau de panthère similaire à celle qu’il utilisera pour mettre en scène les nus de Delacroix dont l’album est conservé à la BNF.

Quant à Hippolyte FIZEAU (1819-1896), physicien français spécialiste de l’optique, il avait obtenu en 1845 avec Léon Foucault les premiers daguerréotypes du Soleil et effectua en 1849 la première mesure précise de la célérité de la lumière dans l’air. La collection de François Lepage compte l’ensemble le plus important de ce photographe jamais conservé. Des pièces muséales.

Enfin, parmi les icônes des livres de photographies que comptait la bibliothèque de François Lepage, deux s’en détachent essentiellement ceux de Hans BELLMER et de Germaine KRULL.

« Le marché a connu des vagues. De tout ce qu’il y avait de plus rare et de plus beau parmi ces images, ces vagues pourtant puissantes n’ont rien emporté. Comme plongées dans un profond sommeil parfois pendant plus de cinquante ans, elles sont aujourd’hui exposées pour la première fois. François Lepage n’était pas seulement discret. Il avait aussi le goût du secret. » Frédéric Lepage, fils de François Lepage.

UNE COLLECTION À TOUTE ÉPREUVE

Dans les années 1960, l’intérêt pour la photographie comme telle reste figé autour de la presse et de l’édition. Dans les institutions muséales, dans la recherche académique et sur le marché de l’art, la photographie est, sinon absente, du moins marginale. Il en va ainsi dans le monde entier.

Dans ces années-là, cependant, à Paris, trois marchands vont entreprendre, chacun à sa manière, la critique en acte de cette situation. André Jammes, le premier, commence sa collection. Gérard Lévy et François Lepage, sortant tous les deux de l’École du Louvre, et installés tous les deux dans la même allée du marché Vernaison, aux Puces de Saint Ouen, décident de s’associer. Pendant les premières années, ils achètent beaucoup, à Drouot, aux Puces et ailleurs, sans se soucier de vendre, chacun ayant par ailleurs conservé ses activités. Leur association durera un bon quart de siècle.

Au cours des années 1970, l’intérêt pour la photographie perd peu à peu ses traits de marginalité et commence à prendre les formes que nous lui connaissons aujourd’hui. A Paris, deux nouveaux marchands rejoignent les trois premiers : Hugues Autexier et François Braunschweig. Les Texbraun, comme on les appelle, s’installent aux Puces, où leur boutique fait face à celle de François Lepage. François Lepage et son épouse se lient d’amitié avec François Braunschweig et Hugues Autexier.

Eugenia Parry, à l’époque, termine sa thèse sur Le Gray. Elle se souvient de ces cinq marchands qui ont un temps d’avance. Elle les appelle les « French amateurs ». Ils savent beaucoup de choses qui ne sont pas encore dans des livres, et leur savoir est généreux. On peut apprendre d’eux. De même, comme en témoignent les catalogues d’exposition et les monographies des années 1970 et 1980, leurs prêts se comptent en milliers.

C’est au cours des années 1980 que se manifestent les signes d’une pleine reconnaissance de la photographie en tant que telle, exposée, étudiée, théorisée, publiée, collectionnée. La Galerie Texbraun, installée rue Mazarine, expose en alternance des photographes contemporains et d’autres, de toutes les époques.

Dans son essai sur la collection Sam Wagstaff du J. Paul Getty Museum, Eugenia Parry rappelle qu’en 1987, elle a dédié son livre sur Le Gray à François Lepage. « Il était – ajoute-t-elle – le plus fervent, le plus rigoureux et le plus généreux chercheur que j’ai jamais rencontré ». Il était aussi le plus discret.

Au début des années 1990, Gérard Lévy et François Lepage sont en désaccord. Ils décident de mettre fin à leur association. Reste à diviser en deux parts égales les dizaines de milliers d’images accumulées. Les opérations du partage s’étendent sur des années. Tantôt image par image, choisies alternativement par l’un et par l’autre au sein d’un ensemble. Ce fut le cas, par exemple, des Greene et des Brassaï. Tantôt en échangeant leur part de deux ensembles, de sorte que l’intégrité de chaque ensemble soit préservée. Ce fut le cas des Fizeau et des Durieu.

C’est par l’effet des choix de l’un et de l’autre que les vingt-cinq ans d’une accumulation commune, rarement guidée par la subjectivité d’un regard ou d’un goût, se partage alors en deux collections. Chacune porte enfin en elle les marques d’une culture et d’une sensibilité singulière. Dans ce partage, les choix de François Lepage se sont souvent tournés vers les plus anciennes acquisitions, les premières découvertes, merveilleuses et bouleversantes.

Exposition Publique
Jeudi 3 novembre 11-18h
Vendredi 4 novembre 11h-18h
Samedi 5 novembre 11h-18h
Lundi 7 novembre 11-18h
Mardi 8 novembre 11h-18h
Mercredi 9 novembre 11h-18h
Jeudi 10 novembre 11h-12h

Photo : Lot 42 : Alphonse-Eugène HUBERT (1797-1841)
Nature morte, 1840 – Daguerréotype pleine plaque remonté, indications manuscrites à l’encre par Hippolyte Fizeau : « Daguerréotype avec fixation au chlorure d’or Mr Hubert – architecte – 1840 » au dos – 15,5 x 20,3 cm (à vue). Estimations : 60.000 / 80.000€

Dates

3 Novembre 2022 11 h 00 min - 10 Novembre 2022 18 h 00 min(GMT-11:00)

Lieu

Salons du Trocadéro

5, avenue d'Eylau 75116 Paris

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