Novembre, 2021

NOVOLAND

jeu04nov(nov 4)14 h 00 minsam27(nov 27)18 h 00 minNOVOLANDPhilippe Calandre & François RonsiauxGalerie Olivier Waltman, 74, rue Mazarine 75006 Paris

Détail de l'événement

« Vous souhaitez créer un monde nouveau ? Un « Novoland », une nouvelle terre promise ? Eh bien, n’ayez crainte : rien n’est plus facile ! Tout d’abord, désignez un élément visuel dans votre image.
Mais s’il est une impression qui se dégage des images de Philippe Calandre et de François Ronsiaux, c’est bien cette « déshumanisation silencieuse » qui se cristallise d’une part dans des architectures « désastreuses » où les hommes, éphémères et insignifiantes créatures, se trouvent pris à leur propre piège, engloutis par ces géants de verre et de béton qu’ils ont enfantés… Et qui les accablent désormais de leur toute-puissance, tel un monument aux arêtes glaciales et angulaires, prêt à absorber toute force vitale émanant de la société. Une déshumanisation mutique qui trouve d’autre part son symbole dans ces tenues blanches immaculées et neutralisées, étendards d’une société ultra-sanitaire et protocolaire, hantée par l’idée de survivre à sa propre disparition, habillant çà et là un clone missionné d’une mallette au milieu d’inquiétants paysages futuristes et brumeux. « Le silence éternel de ces espaces infinis m’effraie », pourrait-on dire en reprenant les mots du philosophe et mystique Blaise Pascal (Les Pensées, « Disproportion de l’homme »). Comme lui, on se sentirait ici égaré entre deux ordres de grandeur. A l’extérieur, l’immensité sans fin d’un univers en expansion, ou d’un monde de bitume aliénant. En nous, le pressentiment de la misérable « vanité » de notre condition.
Cette réduction du vivant à son degré le plus élémentaire laisserait craindre un appauvrissement des êtres et de l’univers, comme dans la « Novlang » de George Orwell qui rétrécit le panel de notre vocabulaire, et par là même uniformise notre expression et nos sentiments. Pourtant, écoutons une dernière fois les envolées visionnaires de Leibniz : « Chaque portion de la matière peut être conçue comme un jardin plein de plantes, et comme un étang plein de poissons. Mais chaque rameau de la plante, chaque membre de l’animal, chaque goutte de ses humeurs est encore un tel jardin ou un tel étang », décrit le philosophe, préfigurant les figures fractales de la mathématique, où chaque objet se pense sur le modèle des poupées russes. Toute chose apparaît en effet comme un ensemble de monades, elles-mêmes constituées d’une multitude d’autres monades plus réduites, ayant la même structure. Elles reflètent, tel un « miroir », l’individu qu’elles constituent, mais aussi l’entièreté de l’univers dans lequel celui-ci évolue : le plus petit préfigure le plus grand. Ainsi, si nous ne sommes qu’un grain de sable noyé dans le ciment des villes, les buildings irradiants qui en jaillissent reflètent à leur tour, de toute leur superbe, la composition élémentaire des granules dont ils sont faits. Oui, nous ne sommes qu’une gouttelette « indiscernable » dans l’océan enserrant ces îles-cités utopiques. Qu’une larme dont la mélancolie se réfléchit dans les nuages vaporisant une lointaine contrée, un jour gris de la vie, quelque part au fond de l’univers… Voilà pour la poésie… Et c’est déjà tant ! »

François Salmeron,
Critique d’art membre de l’AICA-France (Association Internationale des Critiques d’Art)
Enseignant à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, et Paris 8 Saint-Denis, ainsi qu’à l’ESAD de Reims

Philippe Calandre est né en 1964, il vit et travaille à Paris.
François Ronsiaux est né en 1974, il vit et travaille à Paris.

Photo : © François Ronsiaux

Dates

4 Novembre 2021 14 h 00 min - 27 Novembre 2021 18 h 00 min(GMT-11:00)

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