Je est un autre

EN COLLABORATION AVEC JULI SUSIN
Hans Bellmer, Erwin Blumenfeld, Véronique Bourgoin, Brian Duffy, Popline Fichot, Gil (Christa) Funccius, Nan Goldin, Kati Horna, Michel Journiac, Anne Lefebore, Annette Messager, Mirron Mitzkewich, Pierre Molinier, Cindy Sherman, Lucia Sotnikova, Juli Susin, Gavin Turk, Stanistaw Ignacy Witkiewicz, Weegee, Wols, Unica Zürn

Du S novembre au 20 décembre, la Galerie Sophie Scheidecker présente Je est un autre, exposition collective organisée en collaboration avec Juli Susin. Le titre de l’exposition, emprunté à Arthur Rimbaud, reflète le point de rupture dans la conception classique de l’individu. En affirmant « Je est un autre », Rimbaud introduit l’idée révolutionnaire d’une identité fragmentée, fluide, échappant au contrôle du sujet conscient.
Cette réflexion sert de point de départ à cette exposition, qui propose un dialogue entre des artistes modernes et contemporains autour des questions du genre, de l’identité et de l’altérité. A côté des photographies historiques, l’exposition réunit plusieurs artistes du réseau collaboratif Royal Book Lodge, auquel est consacré un livre de recherche de l’historien John C. Welchman (Royal Book Lodge, aux Éditions Hatje Cantz, 2023).
Les notions de genre sont explorées dans le travail de Michel Journiac et de Brian Duffy, qui brouillent les lignes entre masculin et féminin, jouant avec les stéréotypes de genre. Les questions d’auto-représentation et de transforation de soi sont illustrées par la mise en scène et l’adoption de rôles féminins stéréotypés chez Cindy Sherman. Son travail révèle la nature performative de l’identité, questionnant les notions d’authenticité et de projection sociale. Cette réflexion sur l’identité est également présente dans l’autoportrait Camouflage de Gavin Turk, inspiré du célèbre portrait d’Andy Warhol. Cette œuvre joue sur les notions de visible et d’invisible,
questionnant la manière dont les artistes sont perçus a travers leurs œuvres et les images qu’ils construisent.
L’exposition présente également les poupées transgressives d’Hans Bellmer et de Pierre Molinier, qui interrogent les normes corporelles et sexuelles. En manipulant leurs tirages photographiques par le photomontage, surimpression ou les distorsions optiques, l’artiste surréaliste Kati Horna et le photographe Erwin Blumenfeld jouent avec la réalité du sujet représenté.
L’artiste émergente Popline Fichot s’intéresse à des pratiques anticonformistes, marginales et subversives, dans une vision éco-féministe qui place l’humain sur un pied d’égalité avec les éléments naturels. Ses photographies illustrent les effets physiques et psychologiques produits par les événements naturels sur le corps, ainsi que notre relation à la nature. La pratique artistique de Juli Susin interroge la situation du corps dans un écosystème instable, ou les liens qui relient le temps et l’espace sont rompus.
En photographiant des modèles souvent atypiques, Weegee met en lumière la vulnérabilité et l’humanité de ses sujets, tout en offrant une réflexion critique sur les normes sociales.
Les photographies de Nan Goldin, quant à elles, explorent l’intimité et les marges de la société. En capturant son entourage, Goldin saisit des moments de fragilité et de transformation personnelle. Son regard cru offre un contrepoint aux explorations plus conceptuelles de Véronique Bourgoin. Les œuvres de Véronique Bourgoin et de Lucia Sotnikova associent les questions de subjectivité corporelle à des problématiques critiques autour de la reconnaissance des productions techniques.
Les œuvres d’Anne Lebevre, quant à elles, constituent un champ d’essais et d’erreurs entraînant un enchainement de réactions et de réparations colorées. Le film de Miron Mitzkewich enfin croise les questions politiques et esthétiques de la transidentité et les ruptures de l’exil, interrogeant sous forme de défamiliarisation les limites de l’authenticité de la réalité visible.
Cette exposition tisse un dialogue entre des artistes qui, tout en étant issus d’univers différents, se rejoignent dans leur exploration du « Je » comme champ d’investigation et de création. En abordant des thématiques liées à la fragmentation identitaire dans un contexte contemporain, au dépassement des frontières du genre, et à l’ouverture à de nouvelles formes de sensibilité, Je est un autre invite à repenser l’idée de l’identité perçue de plus en plus comme une construction sociale.