Mars, 2025

Guillaume Holzer

jeu06mar(mar 6)8 h 00 minmar30sep(sep 30)20 h 00 minGuillaume HolzerLe Syndrome de StendhalLe Pavillon des Lettres, 12, rue des Saussaies 75008 Paris

Détail de l'événement

Pour la petite histoire.

C’est sur Google Maps que je suis tombé sur ce commentaire. Il m’a sauté aux yeux, comme un éclat de vérité brute. J’aurais pu l’écrire moi-même. Ces quelques mots étaient l’écho exact de ce que je vivais depuis mon arrivée sur cette île, une beauté si intense qu’elle dérange l’esprit, une émotion si forte qu’elle prive du repos. Mais commençons par le début.

Nous étions trois. Trois âmes échouées sur ce fragment de terre flottant au milieu de l’Atlantique, réunies par un hasard d’auberge et une promesse de chemin. Le sentier, à peine visible sous les fougères et les herbes hautes, serpentait à travers un paysage saturé de vert. Le silence était étrange, pesant. Pas un oiseau, pas un insecte, comme si cette nature exubérante avait été vidée de toute vie pour mieux se refermer sur elle-même. Cette absence, loin de rassurer, nous donnait la sensation d’être observés par le paysage lui-même.

Après cinq heures d’errance, nous avons vu la cascade. Elle était là, comme un miracle enfoui, protégée par une cathédrale de falaises. L’eau tombait en filet, limpide, dans un bassin turquoise qui semblait trop parfait pour être réel. Nous sommes restés debout, sans un mot, vaincus par l’émotion. Nous étions comme pris dans une parenthèse, un temps suspendu où rien ne semblait réel.

Le soir, dans l’auberge où nous étions revenus, la fatigue ne m’a pas sauvé. Mes compagnons non plus ne dormaient pas. Nous avons fini par échanger nos impressions dans un murmure, chacun avouant être incapable de se détacher des images de la journée. Une insomnie collective. Nos esprits, saturés de lumière et de formes, refusaient de se poser.

Je sais maintenant ce qui nous est arrivé. Comme pour Stendhal à Florence, l’émerveillement est un feu de joie pour le cerveau. Les neurosciences expliquent que ce type de choc émotionnel active des processus intenses dans notre cerveau. La dopamine, libérée en réponse à la fascination, nous pousse à vouloir prolonger cet état de découverte. La noradrénaline amplifie chaque détail, rendant chaque couleur, chaque texture encore plus vivante. Et le glutamate, ce neurotransmetteur accélérateur cérébral, fait de chaque souvenir un tableau gravé dans nos pensées. Mais ce cocktail chimique, au lieu de nous apaiser, nous maintient dans un état d’hypervigilance. Aux Açores, nous ne dormions pas parce que notre esprit refusait de s’éteindre face à tant de grandeur.

Même la nuit, les Açores continuaient à nous hanter, à graver dans nos esprits chaque cratère, chaque cascade, chaque silence.
Ces îles ne sont pas un territoire. Ce sont des machines à rêver, des pièges pour l’âme. Aux Açores, la solitude est palpable, vibrante, et elle finit par contaminer celui qui s’y aventure. Ce n’est pas un endroit que l’on visite. C’est un lieu qui vous dévore, vous remplit jusqu’à la suffocation.

Cette série de photographies est née de cette expérience. Elle ne cherche pas à raconter une histoire, mais à capturer des fragments de ce vertige, ce moment de bascule entre le réel et l’imaginaire, entre l’éveil et le rêve, car il est rare d’être éveillé à ce point, de sentir son esprit brûler sous le poids du sublime.

Dates

6 Mars 2025 8 h 00 min - 30 Septembre 2025 20 h 00 min(GMT+00:00)

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