Mars, 2025

Bruno Boudjelal

mar11mar(mar 11)9 h 00 minsam31mai(mai 31)18 h 00 minBruno BoudjelalMon cousin Jacques. Mon histoire est iciLa Capsule, Centre culturel André Malraux, 10, avenue Francis de Pressensé 93350 Le Bourget

Détail de l'événement

Mon travail photographique a commencé un jour de mai 1993 où j’ai décidé de comprendre d’où je venais en partant en Algérie pour y chercher cette famille que je ne connaissais pas. Il s’en est suivi pendant de longues années d’incessants allers et retours vers le pays de mon père, pour comprendre enfin qui j’étais. Ce n’est que bien plus tard que j’ai pu m’intéresser à cet ici où je suis né, où j’ai grandi et où je vis.
J’ai donc arpenté, par la suite, pendant des mois, les banlieues de plusieurs grandes villes en France et cela a donné un travail « Les voyages en banlieues / Insight ».
L’Algérie m’avait ramené chez moi. La boucle était bouclée, elle m’avait permis de mieux m’en retourner ici.
Jusqu’à encore récemment, ce cheminement me semblait fini. Toutefois, au fond de moi, une question restait présente : ce travail sur les périphéries de toutes ces villes françaises n’était-il pas encore trop éloigné de ma petite histoire ?

Au printemps 2016, en rangeant des photographies retrouvées, je découvris une vieille photo de mon cousin Jacques et le doute me vint. Cette quête d’identité qui m’avait conduit pendant de nombreuses années en Algérie et dans ces banlieues françaises était-elle vraiment terminée ?

Le cousin Jacques était le neveu de mon arrière-grand-mère Berthe. Il était considéré comme l’excentrique de la famille, sans travail fixe ; il habitait au 40 rue du Président-Wilson au Bourget, un petit pavillon qui lui avait été légué par son père. Il passait son temps entre son amie guadeloupéenne Marie-Rose, – qu’il a présenté une fois à la famille mais qui la trouvé vraiment trop noire – et les rues du Bourget et des villes avoisinantes qu’il photographiait sans relâche avec son Rolleiflex et ce pendant plus de 40 ans.

Jeune adolescent, j’aimais beaucoup le cousin Jacques, il était pour moi un souffle de liberté. Dès que j’ai eu 14 ans et ma petite Mobylette, je me rendais chez lui un samedi après-midi par mois. Je l’accompagnais dans ses longues marches où il photographiait la ville. Le soir, nous mangions ensemble, il me montrait ses nouvelles photographies, m’emmenait au grand cinéma du Bourget L’Aviatic voir ses films cultes (Le Mépris, La Maman et la Putain, Mouchette…) et ne me laissait jamais repartir sans me prêter quelques livres de sa précieuse bibliothèque.

Malheureusement quelques mois après son décès en 1995, je me suis rendu compte que tout son travail avait disparu et que toutes ses images avaient été jetées à la poubelle par la famille ! Plein de rancœur et fâché, je décidai d’oublier tout cela.

En retrouvant cette photo de lui, m’était venue l’idée que, peut-être, je pourrais lui rendre hommage à travers une série photographique. Mais le temps faisant, j’abandonnais l’idée…

Ce sont trois événements très récents qui m’ont fait comprendre que je ne pouvais pas oublier ce projet et que je devais le réaliser car il était essentiel pour cette quête que j’effectue depuis si longtemps.

Le premier, le décès de ma mère en septembre 2019 où je me retrouvai seul pour ses obsèques dans la petite station balnéaire où elle vivait. Je compris que tout ce travail que j’avais effectué en Algérie pour comprendre d’où je venais, qui j’étais, je ne l’avais pas effectué ici en France avec ma famille.

Le deuxième est le confinement que nous avons vécu lors du printemps 2020 où j’ai effectué un petit journal de confinement. Je collectionnais les histoires de vies de mes voisins que je rencontrais lors de mes balades quotidiennes.

Le troisième est le décès de mon père, en septembre 2021, où j’ai appris à ma grande surprise que son épouse avait décidé qu’il serait enterré aux Pavillons-sous-bois et non pas en Algérie comme il me l’avait dit.

Tout cela me confirma que l’histoire, que mon histoire, aussi étaient liées à ce territoire de la Seine-Saint-Denis !

J’ai donc décidé de réaliser un nouveau projet qui s’appelle « Mon histoire est ici ». Situé en Seine-Saint-Denis, qui jusqu’à aujourd’hui a été mon unique lieu de vie, et y travailler sur les différents lieux où j’ai vécu et habité.

« Le Cousin Jacques » est le premier chapitre de ce travail.

Avec l’aide de La Capsule, j’effectue donc depuis le début de l’année 2021 une résidence au Bourget et dans les villes limitrophes. Cela fait donc plus de trois ans que je parcours tous ces lieux où je suis allé et où j’ai habité. J’y effectue depuis un travail photographique, des films super 8, des enregistrements sonores et un journal écrit.

Bruno Boudjelal

Photographe franco-algérien, membre de l’Agence VU’, il vit et travaille entre Paris et l’Afrique.

Né à Montreuil en 1961, Bruno Boudjelal pratique la photographie comme un mode de vie qui interroge sans cesse sa propre identité et nous confronte à la nôtre.

En 1993, il part sur les traces de ses origines paternelles en Algérie. Cette découverte sera le point de départ de 10 ans d’explorations qui l’amènent, entre carnet de voyage et témoignage, à passer du noir et blanc à la couleur, et à assumer la subjectivité de son point de vue. Il élargit par la suite les frontières de ce voyage et de cette aventure à d’autres territoires – éloignés ou non – et témoigne notamment du panafricanisme.

Assumant la question de l’identité comme étant à la fois singulière et inscrite dans une histoire collective, son travail photographique relève du témoignage engagé, du « récit en images qui tente d’approcher une réalité complexe. Mais plus cette réalité est complexe, plus la diffraction des points de vue est intéressante ».

Régulièrement publié dans la presse et lauréat de bourses institutionnelles et de prix prestigieux – dont le Prix Nadar en 2015 pour son livre Algérie, clos comme on ferme un livre ? – Bruno Boudjelal a publié six monographies. Ses œuvres ont intégré les collections publiques françaises, et font l’objet de nombreuses expositions en France et dans le monde.

Parallèlement à cette œuvre internationalement reconnue, Bruno Boudjelal s’engage dans une démarche et une réflexion plus larges autour de la photographie avec la conduite d’interventions socio-artistiques au sein de quartiers, l’encadrement de stages professionnels, ou encore le commissariat d’expositions. En 2017 il assure notamment celui de l’exposition « Ikbal / Arrivées : Pour une nouvelle photographie algérienne » présentée au MAMA (Alger), à l’IMA : la Cité internationale des arts (Paris) puis à la Friche Belle de Mai (Marseille), dans le cadre de la deuxième biennale des photographes du monde arabe contemporain.

Dates

11 Mars 2025 9 h 00 min - 31 Mai 2025 18 h 00 min(GMT+00:00)

La Capsule, Centre culturel André Malraux

10, avenue Francis de Pressensé 93350 Le BourgetGalerie ouverte du lundi au vendredi de 9h à 12h00 et de 13h30 à 18h, le samedi de 10 h à 13 h et de 14 h à 17 h, (fermeture les samedis pendant les vacances scolaires) Entrée libre

La Capsule, Centre culturel André Malraux

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