BLOW-UP

Exposition du Lauréat du Prix 2021 Un photographe pour Eurazéo : BLOW-UP de Patrick Tourneboeuf
avec
Fredéric Stucin, lauréat du prix 2020 avec la série« Le décor»
Marie Hervé & Elsa Martinez, Prix Eurazeo pour la jeune création photographique
Catherine Henriette, Florence Levillain et Christian Siloé, coups de coeur du jury

Depuis plusieurs années je butine, de brocantes en marchés aux puces, des cartes postales semi-modernes datant des années des trente glorieuses sur la thématique des bords de mer. Cette collecte fait écho à mon travail photographique sur les stations balnéaires abandonnées en hiver, « Nulle Part », et à une certaine fascination pour le cinéma comme le film de
Jacques Tati, « Les vacances de Monsieur Hulot » ou tout autant le film éponyme d’Antonioni.
Je suis attiré par ces images tombées dans une forme d’amnésie, usées par le frottement du temps, banalisées par leurs usages et pourtant réalisées par des photographes devenus depuis des anonymes dont les négal » »ifs ont disparu. Ces cartes postales témoignent de leur époque. Elles furent éditées et reproduites en milliers d’exemplaires, exposées à la vue de centaines de regards sur des tourniquets de vendeurs de souvenirs sans que l’on y fasse véritablement attention.
Ce qui m’interpelle dans ces images, c’est à la fois l’état émanant de la fonction de témoignage d’un lieu, sous-entendu : « nous y étions », de transmission d’un message souvent lié aux loisirs, aux vacances, à une intervention photographique banalisée et sans autre motif qu’une illustration «  »positive et ensoleillée » » d’un moment de bonheur dans un lieu défini. Ces scènes de vie légères nous racontent des histoires, elles nous renvoient à nos propres souvenirs, à la chaleur qui nous caresses la peau, aux odeurs de petits riens qui pérennises un temps suspendu pour l’éternité.
Je vais chercher dans chacune d’elles le détail qui rend singulier le moment furtif noyé dans la masse du paysage photographié. Je m’approprie la représentation originale en zoomant, découpant, recadrant la représentation originale pour proposer un autre regard. Nonobstant le caractère désuet qui se dégage de ces scènes, ce choix esthétique rappelle aussi la nature, propre aux images pixellisées de google map, aux extraits de vidéos de surveillance ou aux photographies volées des magazines people.
Véritable trace de notre mémoires collectives, l’œuvre ainsi construite s’inscrit sous un nouveau regard, une réinterprétation. Ces petites figures extraites de leur monde d’encre et de papier forment à la fois un décor et un climat. La réunion de ces corpus est une expression intime.
De ce grossissement est réalisé un agrandissement de grand format tiré sur un papier argentique et monté en diasec ayant comme base pour le plus petit côté une taille de 90 cm. La carte postale originale est présente dans une enveloppe au dos de l’épreuve.
Nous sommes happés par la nostalgie et les souvenirs que convoque cette esthétique très connotée. Mais que voyons nous en réalité ? L’agrandissement des images révèle autant qu’il dissout leur contenu. Ces scènes familières, images d’Epinal, font écho à notre mémoire et au processus de construction et de transformation de nos souvenirs. Recadrées, ces photographies trouvent ainsi une nouvelle histoire.

L’exposition est visible le vendredi 8 avril et du lundi 11 au vendredi 15 avril 2022.