Particulièrement attaché à l’histoire du cinéma, Eric Dizambourg aime le burlesque. Chaplin, Keaton, Tati… « Je serais fier de m’inscrire dans cette filiation : le mime est un art magnifique. Je suis moi-même un peu un clown triste, mais pas si triste et pas si clown ! Mon objectif n’est pas de faire rire ; le rire s’impose quand il doit s’imposer. Mais je ne cherche pas à être sérieux à tout prix. En réalité, les sujets s’imposent d’eux-mêmes » éclaire-t-il.

Vue d’exposition Eric Dizambourg © Olivier Steigel

Vue d’exposition Eric Dizambourg © Olivier Steigel
Eric Dizambourg a commencé le dessin dans son adolescence. Le hobby est vite devenu une passion. Parallèlement, il tourne avec son frère des petits films en super 8 : « Je pensais vraiment devenir comédien. Mais la peinture s’est imposée, alors je suis entré aux Beaux-Arts de Paris, dans l’atelier du peintre abstrait Dominique Gauthier [chantre de l’abstraction structuraliste]. On nous demandait de parler de notre travail. Ainsi, je me suis créé un double, une sorte de clown. Et j’ai eu l’idée de mettre en scène mes propres peintures dans des films, afin de les replacer dans une fiction ».
Les deux techniques s’alimentent mutuellement. Parfois, le film détermine la création d’une peinture. D’autres fois, c’est le tableau qui inspire la scène filmée. « Je démarre par la construction d’un décor. Celui-ci conditionne la suite, tout en laissant une grande place à l’improvisation, explique-t-il. Je peins généralement de très grands formats. La toile est placée au sol, à la manière de Jackson Pollock qui est à l’origine de la technique du ‘dripping’ (on projette ou laisse couler de la peinture sur une toile positionnée au sol). J’utilise une peinture acrylique très liquide que je déverse sur la toile. L’image se dispose peu à peu, de manière diffuse. Dans une 2ème étape, j’ajoute des éléments que je peins plus précautionneusement, parfois un tissu, un poisson, ici souvent du fromage ».
Du dripping aux coloris pop

Bien fait © Eric Dizambourg

Quelques écailles © Eric Dizambourg
Ces éléments, à première vue grotesques, suscitent la réflexion. Ils détournent et révèlent simultanément l’image. « Je raille l’histoire de l’art et à la fois y suis profondément attaché. J’éprouve le besoin d’en rire, mais suis également nostalgique. Mes peintures offrent un regard sur moi, mon vécu : elles sont à la fois joyeuses et poétiques ».
Les amateurs d’art contemporain décèleront aisément les sources d’inspiration d’Eric Dizambourg : Pollock donc pour le dripping. Et Martial Raysse, peintre, sculpteur et réalisateur français, célèbre pour ses portraits ‘pop’ hauts en couleur et dont l’artiste est un proche. Et selon l’humeur, s’y retrouve l’expressionnisme et les lignes déstructurées de Soutine, et jusqu’à la folie proche des peintures noires de Goya. En réalité, on pourrait qualifier Eric Dizambourg d’iconoclaste respectueux.
« Avec le temps, ma technique évolue. Je raconte des histoires de plus en plus précises. J’aime les peintures qui racontent des histoires et qui font du bien. La technique n’est qu’un moyen. C’est le sujet qui compte surtout ».

Vue d’exposition Eric Dizambourg © Olivier Steigel

Vue d’exposition Eric Dizambourg © Olivier Steigel
Parmi les toiles exposées au Moulin Blanchard, figurent deux peintures gigantesques mêlant des éléments de l’histoire personnelle d’Eric et de l’histoire de l’art. Elles symbolisent à elles-seules la démarche de l’artiste. Dans l’une d’elles, on voit un facteur évoquant bien sûr Tati et Van Gogh, mais aussi le déjeuner hebdomadaire chez sa grand-mère en compagnie du facteur du village. Le tout temporisé par un foisonnement de couleurs, de clins d’œil, de mouvements et bien sûr… de fromages…
INFORMATIONS PRATIQUES
Infos : www.lechampdesimpossibles.com