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Partager Partager Temps de lecture estimé : 8minsPour sa toute quatrième et dernière carte blanche, notre invité de la semaine, le photographe français Corentin Fohlen, nous dévoile « Home street home », son dernier sujet toujours en cours, entamé lors du premier confinement, en mars 2020. Une situation exceptionnelle qui a vidé les rues et avenues de sa population, exposant ainsi les sans-abris mais aussi les travailleurs précaires exploités et esclavagisés par des entreprises capitalistes. Pour cette dernière carte blanche, je vais me permettre de parler de mon récent travail. Non pas pour en faire la promotion, mais pour aborder ce dont je parlais dans la première carte blanche, la notion étroite entre une pratique photographique et un engagement personnel. Lors du premier confinement, comme beaucoup j’ai erré dans les rues de Paris à la recherche de points de vue mémorables pour raconter cette vision d’une capitale aux rues vidées de ses habitants. Mais ce qui m’a surtout frappé était l’omniprésence des sans-abris ainsi que des livreurs de repas Uber, Deliveroo… Paris sous confinement mettait soudainement en exergue sa grande misère : les travailleurs précaires exploités et esclavagisés par des entreprises capitalistes – encouragées par des citadins avides du tout, tout de suite – et les sans-abris qui, à force d’être omniprésents, en devenaient invisibles au quotidien. Les avenues vides ont laissé apparaitre ces deux catégories de population souvent mal connues et déconsidérées. Confiné à la rue, Paris 2020 © Corentin Fohlen/ Divergence Confiné à la rue, Paris 2020 © Corentin Fohlen/ Divergence Confiné à la rue, Paris 2020 © Corentin Fohlen/ Divergence Confiné à la rue, Paris 2020 © Corentin Fohlen/ Divergence Confiné à la rue, Paris 2020 © Corentin Fohlen/ Divergence Confiné à la rue, Paris 2020 © Corentin Fohlen/ Divergence Confiné à la rue, Paris 2020 © Corentin Fohlen/ Divergence Confiné à la rue, Paris 2020 © Corentin Fohlen/ Divergence Confiné à la rue, Paris 2020 © Corentin Fohlen/ Divergence Confiné à la rue, Paris 2020 © Corentin Fohlen/ Divergence Confiné à la rue, Paris 2020 © Corentin Fohlen/ Divergence Pour avoir souvent collaboré avec le média d’information solidaire Sans-A, en réalisant des portraits de sans-abris, le thème ne m’était pas indifférent. Plutôt que de montrer leurs gueules, trop vues, trop clichés, j’ai essayé de les raconter par les traces de vie qu’ils laissent. Ces matelas, duvets, tentes, abris, constructions de survie plus ou moins cachés qui jonchent le bitume parisien. Clairement, ce sujet photographique est depuis toujours hyper photographié. Les clochards, les SDF, les sans-abris sont sûrement le premier « sujet » qu’un preneur d’images amateur citadin photographiera dans sa pratique. A mes débuts ça l’était. Les années passant on oublie ces hommes et femmes qui vivent à nos pieds. Le sujet en bas de chez soi est toujours moins « exotique » que les reportages à l’autre bout de la planète. Ils sont une image d’Epinal de la capitale. Il y en a toujours eu, il y en aura toujours. Fatalité. Un jour de confinement on redécouvre leur omniprésence. Les rues vides, ils nous explosent à la gueule. Eux et la pauvreté en France. Eux et la précarité qui peut potentiellement toucher n’importe lequel d’entre nous. Un terrain fragile, un licenciement, une séparation, une hypersensibilité… et on se retrouve à la rue. Certains avaient la belle vie, d’autres étaient flambeurs. Un certain nombre viennent de la DASS, ou sont passés par l’armée. Parler avec eux c’est faire tomber des clichés : loin d’être tous alcooliques, certains gagnent bien leur vie à la manche même si assez peu la pratique réellement. Quelques-uns m’ont déclaré leur bonheur de vivre ainsi. Par contre clairement le plus dur pour eux n’est pas le froid, mais l’absence de réponse à un « bonjour » lancé à un passant. Beaucoup ne souhaitent pas une pièce, mais déjà juste un regard franc pour leur répondre par la négative leur rendrait foi en l’humain. Clairement la plupart rêverait d’avoir leur chez-eux. En attendant ils se créent un univers pour passer la nuit, un « chez-soi » qui va du simple carton posé à même le sol à la véritable cabane construite pour durer. Un jour, juste avant de rentrer au chaud chez soi, on réalise – en laissant cette humanité sous un pont, un porche de résidence, au milieu d’un trottoir, ou caché dans le tunnel d’une autoroute – que l’accès au logement pour tous devrait être une véritable priorité, au même titre que la santé ou l’alimentation. Une obligation. © Corentin Fohlen/ Divergence © Corentin Fohlen/ Divergence © Corentin Fohlen/ Divergence © Corentin Fohlen/ Divergence © Corentin Fohlen/ Divergence © Corentin Fohlen/ Divergence © Corentin Fohlen/ Divergence © Corentin Fohlen/Divergence. Paris, France. 1er avril 2021. Apres la manifestation du DAL (Droit au logement) contre les expulsions et evacuation de camps informels de refugies, a la veille de la fin de la treve hivernale, les exiles qui n’ont pu etre heberge se sont retrouve au jardin Villemin pour y passer la nuit. Ici seconde nuit accompagnes par les associations dont Utopia 56. Pour ce travail, j’ai mis le « concept photographique » au service d’une narration. Montrer la multitude, le cumul, la quantité par la forme. En y ajoutant, au delà d’un cadrage frontal et sobre, un aspect esthétique permettant d’attirer le regard : soit un montage diptyque, soit parfois un grand aplat de couleur, ou une mosaïque de photos augmentant l’échelle de leur omniprésence. J’ai d’abord réalisé une série de photos des personnes qui dormaient à même le trottoir, allongés le plus souvent dans un duvet, à l’abri sous l’auvent d’une brasserie ou devant un commerce fermé pour cause de confinement. Mon travail s’est ensuite élargi aux constructions qu’ils mettaient en place pour s’abriter : agglomérat de cartons, tente, parfois baraquement ou tout objet abandonné par les habitants sur les trottoirs. J’ai volontairement occulté la présence humaine. En déshumanisant les lieux, j’accentue l’impression de solitude tout en mettant l’observation sur ce qui fait office de « logement ». Dans la foulée, j’ai remarqué que de nombreux systèmes avaient été mis en place pour éviter la présence des SDF: ce que l’on appelle du mobilier urbain anti-sdf ! Mobilier anti SDF © Corentin Fohlen/ Divergence Mobilier anti SDF © Corentin Fohlen/ Divergence Mobilier anti SDF © Corentin Fohlen/ Divergence Mobilier anti SDF © Corentin Fohlen/ Divergence Mobilier anti SDF © Corentin Fohlen/ Divergence Mobilier anti SDF © Corentin Fohlen/ Divergence Mobilier anti SDF © Corentin Fohlen/ Divergence Mobilier anti SDF © Corentin Fohlen/ Divergence Mobilier anti SDF © Corentin Fohlen/ Divergence Une inventivité du design allié à la perversion du désir de faire fuir les précaires qui auraient la mauvaise idée de s’asseoir ou s’allonger sur un banc public, au bord d’un rebord ou au pied d’un immeuble. La fondation l’Abbé Pierre remet même depuis deux ans un prix ironique : « les pics d’or » ! Mon dernier travail actuel est sur la présence des sans-abris et exilés intégrés plus largement dans l’architecture parisien. Notamment autour des grands monuments emblématiques de la ville. J’essaye de contrer la splendeur de la ville lumière par l’obscur contraste où l’on abandonne ces hommes, femmes et enfants à leur sort. La série HOME STREET HOME est en cours: www.corentinfohlen.com/2020/11/home-street-home/ Marque-page1
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