Carte blanche à Philippe Sérénon : Elliott Erwitt

Après nous avoir parlé de sa relation avec Joel Meyerowitz, pour sa quatrième carte blanche, notre invité de la semaine, le commissaire d’exposition Philippe Sérénon, revient sur sa rencontre avec le photographe franco-américain, Elliott Erwitt dont la rétrospective ouvre ses portes ce week-end à la Sucrière, à Lyon. Dans cet article Philippe nous parle l’attachement d’Erwitt pour le tirage numérique tout en conservant le tirage traditionnel au platine…

Chez HP, nous avions fait un accord avec MAGNUM qui me permit de rencontrer un grand nombre des photographes de l’agence, dirigée alors par Mark Lubell, Plusieurs photographes vivaient à New York et j’y rencontrais David Alan Harvey, Thomas Hoepker et Elliott Erwitt entre autres.
Sur le plan technique la question se posait de la durabilité des tirages pigmentaires et, à Barcelone, un ingénieur de Designjet eut l’idée de créer un profil ICC pour imprimer sur transparent au lieu du papier et ainsi créer un négatif.

Chez Elliott Erwitt

Chez Elliott Erwitt

Chez Elliott Erwitt

J’ai donc été rencontrer Elliott chez lui, avec une vue imprenable sur Central Park et des murs où l’art le disputait à l’humour, trait de caractère de cet homme exceptionnel.
Je lui au demandé : « A quel moment ajoutez-vous cette touche d’ironie dans vos photos, à la prise de vue ou à l’editing ?» Sa réponse malicieuse fut : « Which Irony » ?

USA. New York, New York. 1974. © Elliott Erwitt / Magnum Photo
Ce mythique cliché est l’affiche de la nouvelle rétrospective à la Sucrière

Je lui proposais de faire une expérience et de faire des tirages grand format au platine. Imaginez un négatif de 44’ (110 cms) de large pour faire des tirages uniques, par contact, avec une durabilité infinie !

A Lvov, Tirages platine

A Lvov, Tirages platine

A Lvov, Tirages platine

Il accepta le projet avec enthousiasme et mon compère américain chez HP, Harald Johnson, nous emmena chez le meilleur expert des tirages au platine : Arkady Lvov, né la même année que moi à Odessa (lui…), qui tire encore aujourd’hui pour les plus grands artistes du monde.
Elliott nous confia 12 photos iconiques et le résultat fut à la hauteur de nos espérances. Elles furent tirées, vendues aux enchères et sont accrochées aujourd’hui dans les plus belles maisons des Hamptons, de Martha’s Vineyard ou d’ailleurs.
Depuis le procédé a fait florès et les collectionneurs ont compris la valeur de tels tirages. De fait, le numérique n’est pas simplement un procédé de substitution mais offre un espace de création à qui veut bien s’en donner la peine comme Albarran- Cabrera qui ont une technique personnelle qui donne à leur tirage la même beauté qu’un tirage Fresson.

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