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Après vous avoir dévoilé les premières découvertes de cette 53ème édition des Rencontres d’Arles sélectionnées par notre critique, Marie-Elisabeth de la Fresnaye, voici la seconde partie des expositions à ne pas rater avant leur fermeture le 25 septembre ! Prolonger l’été dans la douceur du sud, riche de multiples festivals et propositions artistiques et se laisser porter loin du spectre en filigrane d’une rentrée politique et sociale qui promet d’être compliquée.

Arles, tout d’abord et la magie des Rencontres même si une relative gentrification se remarque dans certains quartiers, la ville étant en intense chantier sous l’impulsion de la collectionneuse et mécène suisse Maja Hoffmann qui ne laisse personne indifférent depuis que le paysage est soudain devenu vertical par l’irruption de la tour Frank Gehry, vigie de son campus ultra désirable haute de 8 étages.

Plus qu’une utopie, la Fondation Luma est devenue un emblème, les nostalgiques tournés vers le temps d’avant ne ménageant pas leurs critiques. Faut-il pour autant bouder les propositions d’Arthur Jaffa et de James Barnor ? Dommage en tous cas que la billetterie ne soit pas compatible entre les deux antennes.
Ce préambule posé, revenons aux Rencontres qui dans leur ensemble tiennent leurs promesses.

© James Barnor

Il est difficile de finaliser une short-list d’une offre pléthorique et de très haut vol, alternant les têtes d’affiches (Arthur Jaffa, James Barnor, Lee Miller..) ou les révélations (Katrien de Blauwer, Bettina Grossman..) autour du féminisme, de la performance, des enjeux climatiques. Je vous propose de faire un pas de côté pour nous concentrer sur de vraies découvertes, loin des sentiers battus, beaucoup ayant été écrit sur les stars du marché.

Arash Hanaei et Morad Montazam « Hantologie suburbaine » -Cloître Saint-Trophime – BMW Art Makers

Série Hantologie suburbaine, croquis pour vidéo et dessins (en cours), 2022. Avec l’aimable autorisation d’Arash Hanaei / BMW ART MAKERS.

L’exposition Hantologie suburbaine de l’artiste Arash Hanaei et du curateur Morad Montazami, premier duo lauréat du programme BMW Art Makers, propose de repenser notre rapport aux architectures utopiques des années 1960-1970 et à l’écosystème périphérique de la banlieue qui les accueille, en le plongeant dans l’univers virtuel du métavers et de la réalité augmentée. Il s’agit, selon le duo, d’« un projet d’installation innovant, proposant une poétique et une politique visuelle à même de penser l’émancipation du spectateur, à l’heure de la capture d’images, du big data et d’autres guerres d’algorithmes »

Rahim Fortune, lauréat du Prix Découverte Louis Roederer 2022

Dans cette belle église des Frères Prêcheurs, les 10 projets internationaux retenus prennent une forte vibration.

Le Prix Découverte Louis Roederer 2022 a été décerné à Rahim Fortune pour son exposition Je ne supporte pas de te voir pleurer.

Rahim Fortune. Billy et Minzly, série Je ne supporte pas de te voir pleurer, 2020. Avec l’aimable autorisation de Sasha Wolf Projects et de l’artiste.

Rahim Fortune. Le bras de Gem, série Je ne supporte pas de te voir pleurer, 2020. Avec l’aimable autorisation de Sasha Wolf Projects et de l’artiste.

Né en 1994 à Austin aux Etats-Unis, Rahim Fortune vit et travaille à New York. Son projet intitulé Je ne supporte pas de te voir pleurer débute avec son retour au chevet de son père malade et se poursuit, malgré le poids du deuil, en même temps que le monde fait l’expérience de la pandémie, et les États-Unis celle du meurtre de George Floyd. Il s’agit d’un récit familial nourri d’histoire, où se jouent la cicatrisation des blessures de l’auteur, et la réduction des fractures du pays. S’il s’inscrit dans la tradition documentaire, c’est dans le souci d’une redéfinition et d’une actualisation de l’image.

« Une avant-garde féministe. Photographies et performances des années 1970 de la collection Verbund, Vienne » Mécanique Générale

Francesca Woodman. Visage, Providence, Rhode Island, 1975-1976. Avec l’aimable autorisation de The Woodman Family Foundation / Artists Rights Society (ARS) / Bildrecht / COLLECTION VERBUND, Vienne. Une Avant-garde féministe. Photographies et performances des années 1970 de la COLLECTION VERBUND, Vienne

Une exposition qui tord le cou aux préjugés les plus tenaces et devrait figurer au programme de tous les lycées européens ! Gabriele Schor commissaire et directrice de la collection Verbund à Vienne, à l’origine de nombreux ouvrages sur l’avant-garde féministe des années 1970 déploie un panorama de ces pionnières selon un princioe d’intersectionnalité à partir des discriminations subies. Valie Export, Cindy Sherman, Orlan, Ana Mandieta, Helena Almendra, Francesca Woodman… mais aussi des artistes autrichiennes moins connues en France, elles se saisissent de moyens très simples et souvent issus de la sphère domestique pour dénoncer diktats et enfermements sans compromis et ni tiédeur.

Babette Mangolte – Eglise Sainte Anne

Babette Mangolte. Trisha Brown répète « Line Up » dans son loft de Broadway avec, de gauche à droite, Wendy Perron, Judith Ragir, Trisha Brown, Mona Sulzman et Elizabeth Garren, 1977. Avec l’aimable autorisation de Babette Mangolte.

Prix Women in Motion 2022 (Kering), la New Yorkaise d’adoption fait l’objet d’une importante exposition « Capter le mouvement dans l’Espace » Ayant côtoyé toute la scène de la modern danse autour de figures emblématiques telles que Trisha Brown, Yvonne Rainer, Simone Forti, Lucinda Childs, Philip Glass, Joan Jonas, Robert Whitman… au Judson Dance Theater, à la Sonnabend Gallery ou à la Judson Memorial Church, elle entame une archive de la performance entre cinéma expérimental, installation et photographie. Le temps, le déplacement des corps, les temporalités, les improvisations…sont des paramètres qu’elle interroge dans ce qu’elle appelle « la camera subjective ». Babette Mangolte a également été directrice de la photographie pour Chantal Akerman. Il faut prendre le temps de se plonger dans cette masse d’archives qui peut paraître très spécialisée de prime abord.

La Fondation Lee Ufan et Requiem aux Alyscamps

Pour se remettre de ces bouillonnantes visions, place à la méditation dans l’élégant Hôtel de Vernon investi par Lee Ufan et requalifié par l’architecte et ami Tadao Ando pour y installer sa fondation. Ce 3ème lieu arlésien accueillera des activités artistiques en plus des peintures et installations de l’artiste coréen. Pour les Alyscamps, lieu patrimonial emblématique, il imagine avec le commissaire Alfred Pacquement un cheminement en 14 stations autour de l’au-delà, du sacré, de l’invisible à partir de ses matériaux de prédilection en tension.

Estefanía Peñafiel Loaiza, « Carmen (Répétitions) » ENSP

Estefanía Peñafiel Loaiza. Carmen (répétitions), 2021-2022. Avec l’aimable autorisation de l’artiste.

Mention spéciale pour le projet d’Estefanía Peñafiel Loaiza, amorcé lors de son séjour à la Villa Médicis à partir d’un livre d’Italo Calvino autour de l’histoire d’une femme disparue en Equateur que l’artiste reconstruit à partir d’archives réelles ou imaginaires invitant chaque visiteur à se projeter dans cette fiction parcélaire et fantomatique.
Avec sept étudiant. e. s, Ludivine Fernandes, Juliette Fréchuret, Loïsà Gatto, Basile Lorentz, Iris Millot, Christiane Rodrigues Esteves et Beatriz de Souza Lima.

A LIRE :
> La première partie de l’article « Arles, coups de coeur et coups de gueule ! »

INFORMATIONS PRATIQUES

lun04jul(jul 4)10 h 00 mindim25sep(sep 25)19 h 00 minLes Rencontres d'Arles 2022Visible ou invisible, un été révéléLes Rencontres d'Arles, 32, rue du Docteur Fanton 13200 Arles


https://www.rencontres-arles.com/fr/
Arthur Jaffa et James Barnor :
LUMA Arles
35 Av. Victor Hugo
13200 Arles
https://www.luma.org/fr/arles.html

Marie-Elisabeth De La Fresnaye
Après une formation en littérature et histoire de l'art, Marie de la Fresnaye intègre le marché de l'art à Drouot et se lance dans l'événementiel. En parallèle à plusieurs années en entreprise dans le domaine de la communication éditoriale, elle créé son blog pour partager au plus grand nombre sa passion et expertise du monde de l'art contemporain et participe au lancement du magazine Artaïssime.

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