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Partager Partager EvénementsL'InterviewPhoto Cinq histoires de famille Entretien avec Laure Vasconi Ericka Weidmann1 avril 2022 Temps de lecture estimé : 4minsLe 6 avril, l’Hôtel de Sauroy accueille cinq femmes photographes autour d’une thématique commune, celle des histoires de famille. Une exposition intitulée « Cinq histoires de famille » réunissant cinq auteures éditées par les éditions Filigranes. À cette occasion, 9 Lives magazine vous propose – tout au long de cette semaine – de rencontrer chacune des artistes exposées et de plonger dans leurs histoires familiales respectives. Aujourd’hui, c’est la photographe française Laure Vasconi qui nous présente sa série « L’Après Jour ». Un journal photographique au croisement du réel, de l’intime et de la fiction… Quelle est votre première rencontre avec la photographie ? Il y a eu plusieurs rencontres autour des arts en général très tôt. L’environnement familial était porté sur les arts et les artistes; la musique pour ma part, la danse pour ma soeur, sur les oeuvres et les chantiers le we avec un père architecte, ce qui développe un certain sens de l’espace et de la lumière et qui inconsciemment m’ont formés. Mes premières photographies sont d’ailleurs des photographies d’architecture Noir et Blanc réalisées au Rolleiflex au format carré 6×6. Dans quel contexte et comment avez-vous décidé d’entamer cette série ? L’Après Jour est un retour sur 20 ans d’archives. Rassemblées dans ce livre, beaucoup de séries s’y croisent. Elles traversent l’intime et le monde et sont assemblées ici avec l’idée d’un retour sur images qui se sont fabriquées sur le long terme, l’intime y est intrinsèquement lié. Le livre était donc l’espace idéal pour travailler avec Nicolas Rouvière sur la conception graphique d’un objet éditorial et pour l’investir « librement ». Leonard at Home est une série réalisée dans un temps très court, celui du confinement (Mars-Mai 2020). Cette série s’est faite spontanément pendant cette période si « extra- ordinaire ». Une image par jour avec mon fils Leonard tel un dialogue face à ses questions et au temps suspendu à l’intérieur de la maison. Tantôt caché, tantôt en super héros, ce dialogue photographique nous a permis d’improviser des réponses face à cette situation si irréelle et abstraite… Comment avez-vous décidé de traiter ce sujet ? Dans les deux cas, le livre est le support de ces deux récits. Pour l’Après Jour, n’ayant travaillé que sur la mise en page et l’enchaînement du récit pour l’impression du livre, j’ai repris les macules que j’ai scannées et que je dispose en collage mural. Pour Leonard at Home, une image par jour postée en temps réel a finalement construit la série de manière chronologique que l’on a ensuite mise en page avec jessica Zanardi (FouinZanardi Studio). En abordant le thème de la famille dans votre série, pensez-vous que la photographie joue un rôle de thérapie ? La photographie peut jouer un rôle de thérapie avec beaucoup de thématiques et le thème de la famille, en ce qui me concerne est toujours en filigranes dans mes sujets; de l’architecture en passant par le voyage ou encore les derniers travaux de collecte de récits et d’images auprès des familles restituée sous forme de journaux, Cité(s) dans le Texte I et II (mission France(s) Territoire Liquide et résidence à Aulnay-sous-Bois). A travers la thématique de la famille ou de l’album de famille, tous les sujets sont abordés, qu’ils soient intimes ou politiques… J’en reviens à la notion de l’intime et du monde. Hormis la thématique, y a t-il un lien qui vous rassemble toutes les cinq ? A travers cette thématique qui ici nous rassemble, on perçoit d’innombrables possibilités de parler de l’universel, chacune avec son écriture qui peut refléter sa propre écriture photographique mais sans nous y enfermer. Je crois qu’il est intéressant de décrypter ici l’idée d’une tentative de récits différents qui s’assemblent et cohabitent et c’est tout l’intérêt de cette exposition. En ce qui me concerne et ce qui me motive à participer, c’est d’imaginer une séquence ou un geste en rapport à cette idée de montrer ensemble sur un même sujet et autour d’un livre de chez Filigranes. Une carte blanche qui offre la possibilité à chacune de répondre librement. J’y présente pour ma part deux séries distinctes et liées à la fois, et j’adapte un dispositif en lien avec le sujet et son support, le livre. INFORMATIONS PRATIQUES Hotel de Sauroy58 Rue Charlot 75003 Paris mer06avr(avr 6)15 h 00 mindim17(avr 17)20 h 00 minCinq histoires de famillecinq regards — cinq artistesHotel de Sauroy, 58 Rue Charlot 75003 Paris Détail de l'événementCette exposition rassemble cinq auteures éditées par Filigranes Éditions qui ont en commun de travailler chacune sur le thème de la famille. Cinq écritures singulières qui explorent ce sujet du Détail de l'événement Cette exposition rassemble cinq auteures éditées par Filigranes Éditions qui ont en commun de travailler chacune sur le thème de la famille. Cinq écritures singulières qui explorent ce sujet du plus intime au plus universel. Recherches dans les albums pour Catherine Poncin, recomposition d’une famille éclatée pour Rima Samman, récit intime chez Laure Vasconi, révélation d’un secret chez Alexandra Bellamy ou encore enquête sur son passé pour Sylvie Hugues. À l’aide d’archives, de textes ou d’interventions sur le papier photographique, ces cinq histoires recomposent un puzzle qui démontre la richesse de ce thème devenu un genre à part entière ces dernières années. Avec : Alexandra Bellamy Sylvie Hugues Catherine Poncin Rima Samman Laure Vasconi Bellamy / Bellamy Alexandra Bellamy Le projet éditorial Bellamy / Bellamy s’inscrit dans la lignée des contes, des mythologies, histoires dans lesquelles les secrets de famille sont omniprésents. Il est d’abord le travail photographique d’Alexandra Bellamy autour de son secret de famille, autour de Claude, Dieter et de Mother. Mais aussi de Carine et les autres. Un secret de famille qui entoure sa naissance en 1970 et qui lui est révélé par sa mère, 22 ans plus tard. Dans sa pratique de la photographie documentaire, Alexandra Bellamy cherche toujours l’envers du décor, le pas de côté. Elle éprouve les différentes strates des histoires passées et présentes, leur densité, leurs mythologie. Progressivement, elle prend conscience que son travail est très empreint de l’histoire de ce secret. Il y a la réalité telle qu’elle apparaît depuis l’enfance et derrière ces apparences, une autre réalité. Durant ce long parcours personnel, et photographique, elle rassemble les photographies des lieux de son enfance ou des lieux qui l’évoquent, des portraits, des photogrammes (issus de séquences vidéos) et des archives. Les archives sont diverses : lettres, Polaroïds issus d’albums de familles et dessins. Ici chaque photographie et documents collectés ont un sens et une valeur, directement reliés au secret. En 2017, à la suite de sa rencontre avec ses demi-frères et sœurs, elle ressent la nécessité de donner une forme à ce récit familiale qu’elle réécrit, pas après pas, depuis ses 22 ans. En 2019, avec la graphiste Marion Kueny, commence l’élaboration d’une édition. L’idée centrale est de créer un récit non linéaire qui soit un équivalent à son expérience du secret. La numérotation des pages devient des dates. La chronologie est bousculée. Les points de vue se succèdent comme dans une pièce de théâtre. Avec cette publication, le secret n’en est plus un. Comme l’écrit Marie Robert dans la postface du livre « Il est devenu histoire, imago, images. » El Pueblo Sylvie Hugues À 12 ans, la vie de Sylvie Hugues bascule. Elle habite alors à Cullera un village situé près de Valencia, en Espagne. Au retour d’une sortie scolaire, on lui apprend que sa mère vient d’être tuée par son deuxième mari, qui exerce le métier de policier. Elle doit alors quitter subitement l’Espagne, et le paradis de l’enfance, pour retrouver dans les cités de la banlieue parisienne un père qui ne sait pas l’aimer et une belle-mère agressive. À la douleur du deuil, s’ajoute celle de l’exil. De cette période de sa vie, il ne lui reste qu’un album de famille, quelques papiers jaunis et le jugement du tribunal. Son beau- père n’avait écopé que de deux années de prison. Crime passionnel, disait-on alors… Aujourd’hui on parlerait plutôt de féminicide. À 18 ans, elle coupe les ponts avec sa famille et se lance dans le cinéma, la photographie et l’écriture. Le souvenir de sa mère et de ce drame continue de la hanter, mais c’est en 2014, avec une nouvelle » « violence, sociale cette fois, que cette plaie s’ouvre de nouveau. Un licenciement brutal et injuste la replonge dans son passé. Elle décide alors de retourner en Espagne, afin de retrouver les traces de son enfance, revoir ses copines de classe, saluer les religieuses qui l’ont recueillie à la mort de sa mère. Elle prévoit aussi de revoir le fils du meurtrier qu’elle considérait, enfant, comme son grand frère. Sur place elle prend des notes, fait des photos et décide de bâtir un récit autobiographique où vont se mêler ses propres mots, ses propres images avec ses photos de famille et les rares documents administratifs retrouvés. Ainsi naît le projet « El Pueblo » qui sera réalisé en partie à la résidence des Treilles. Il va s’agir de construire une exposition, un livre de textes et de photographies, pour exorciser les démons du passé et proposer une œuvre « autonome » où l’intime devient universel. Par Monts et Vallons Catherine Poncin Catherine Poncin, photographe de l’image par l’image, s’est immergée dans les Archives départementales de l’Orne sur les fonds patrimoniaux tels que Lancre – Pasquis – Grignon, pour y découvrir des ensembles photographiques de grande qualité. Elle en a tiré des compositions qui font revivre des personnages d’une époque révolue. Leurs histoires familiales résonnent encore dans la mémoire des anciens à travers les personnages, les architectures, les paysages que l’artiste a mis en perspectives par des associations d’images en diptyque. Par ailleurs, l’artiste est entrée dans les fermes et autres demeures pour y rencontrer les habitants qui lui ont confié secrets et photographies de famille. Tout comme avec les images d’archives, elle a composé, parfois associée, fragments photographiques du fonds départemental IXe aux trouvailles découvertes dans les albums de famille datant du XXe siècle. Ce travail est un hommage vibrant à ces territoires cachés dans les intimités familiales. Il renvoie le visiteur à l’histoire locale que ce soit la sienne ou celle de son voisin et plus largement à l’histoire de nos campagnes. Le travail de Catherine Poncin laisse place à l’imaginaire de chacun, pour réactiver des morceaux d’une histoire qu’il ou elle aura projetée ou vécue. Le regard est porté par la beauté intemporelle des images anciennes dont la profondeur des noirs et des blancs est accentuée par le travail de réappropriation de l’artiste et des jeux d’irisations leur conférant une aura contemporaine. À l’inverse, l’aspect décolorisé des images à l’instamatic, des Polaroïds ou des diapositives 24 x 36 datant des années 60/70 en font une matière privilégiée pour réactiver des pans mémoriels. Avec elles, le temps qui a passé se mesure et transporte dans l’univers, pas si lointain, des parents et grands-parents. – Christine Ollier Proposition curatoriale de Christine Ollier avec la Pocket Galerie et le Parc National du Perche Carte blanche résidence – Art Culture & Co – 2021 L’amour se porte autour du cou Rima Samman J’ai longtemps oublié que j’avais une famille, à cause des circonstances de la vie qui ont produit éloignement et rupture des liens. Issue d’une famille libanaise, je suis la benjamine d’une fratrie de trois enfants, aujourd’hui tous installés à l’étranger. Mes frères vivent à San Francisco et à Dallas, moi à Paris. Mes parents, eux, sont restés au Liban. Depuis notre départ, la famille s’était réunie deux fois en trente-quatre ans : une fois à Détroit, l’autre à Dallas. Cherchant à comprendre cet étrange phénomène de nous voir si peu en une si longue période, j’ai sorti un jour mes vieilles photos de famille, afin d’y déceler des indices avant coureurs d’un fait d’autant plus inhabituel pour une famille libanaise, chez qui la notion d’appartenance clanique est fortement constitutive de notre identité intime et sociale. Or, en me plongeant dans mes vieux albums de famille, je n’y ai trouvé que la preuve éclatante et univoque qu’avant, on était vraiment ensemble. Qu’avant, on formait une « vraie » famille : harmonieuse, heureuse et unie. Cherchant à réparer ce que le temps et l’exil avaient à mes yeux défait et terni, je me suis auto missionnée d’assembler ma famille éclatée, en la réunissant une troisième fois au Liban. Or en en touchant un mot à mon frère cadet, celui-ci m’a dit sur un ton décomplexé : « Mais quelle famille ? Il n’y a pas de famille ! » Ces mots ont résonné en moi comme une poignée de cailloux jetée au fond de ma torpeur. Me suis-je donc naïvement fourvoyée toutes ces années, en me reprochant d’avoir abandonné et oublié une famille qui n’existait pas vraiment ? Mais alors, que signifient toutes ces photos de famille qui mettent en scène notre bonheur d’être ensemble ? Quelle valeur, quel crédit accorder à ces images argentiques, muées avec le temps en images mentales ? Né de ces questions liées aux constructions mentales de nos représentations identitaires, L’amour se porte autour du cou s’attache à rajouter de la représentation fictionnelle et fantasmagorique à la représentation collective du groupe familial. Cela pour conter avec une ambivalence joyeuse notre penchant à réinventer et à fantasmer nos identités et nos origines. L’imaginaire familial me passionne dans ce qu’il a d’excessif, de ridicule, de touchant, de drôle et de profondément humain. Dans ce qu’il a d’enfantin et de créatif. Et dans ce qu’il est parfois nécessaire pour intérioriser des événements qui nous auraient probablement sans cela détruits. Laure Vasconi L’Après Jour C’est un retour sur images, un état des lieux, un flux de notes, un éditing d’archives sans chronologie et de toute provenance. Un laboratoire qui croise les recherches, personnelles ou professionnelles, les commandes, les projets, réalisés ou non et qui fait écho à une pratique photographique du quotidien tel un carnet de route. De l’ordre de l’essai photographique, c’est une tentative libérée des codes de la série ou du sujet, c’est une quête ; de sens, de mémoire, d’un médium à redéfinir dans toutes ses formes de production et de diffusion. C’est une plongée dans un matériel d’archives qui se fabrique depuis plus de vingt ans, un instant où les choses se posent pour continuer, un corpus créé tel un geste libérateur, un livre pour garder une trace. Leonard At Home Début mars, je me suis retrouvée confinée avec mon fils Leonard, jeune trisomique âgé de 16 ans. J’ai été confrontée à certaines de ses questions face à cette nouvelle réalité abstraite, le coronavirus. Face au temps, devenu libre et élastique, vécu comme une expérience « cooooool » par Leonard dans un premier temps, il a fallu progressivement s’adapter. Leonard a alors mis en place un jeu en convoquant des personnages fictifs qui l’ont aidé à trouver des réponses à ses interrogations quotidiennes et en réaction à sa propre compréhension. Un rituel d’une photo par jour s’est ainsi instauré, tel un dialogue entre nous pendant tout ce temps suspendu à l’intérieur de la maison. Une situation extra-ordinaire qui requiert des réponses extra-ordinaires. Cette série fait écho à cette situation exceptionnelle, telle une expérience qui s’inscrit dans la continuité de mon travail, nourri de l’intime et du monde. Ces photographies ont été réalisées pendant le confinement de Mars à Mai 2020. Dates6 (Mercredi) 15 h 00 min - 17 (Dimanche) 20 h 00 min(GMT-11:00) LieuHotel de Sauroy58 Rue Charlot 75003 Paris Hotel de Sauroy58 Rue Charlot 75003 Parisdu lundi au samedi, de 11h à 19h nocturne les jeudis jusqu’à 21h entrée libre Get Directions CalendrierGoogleCal Par Monts et Vallons L’après Jour laure Vasconi Édition Filigranes Sortie en février 2020 16 x 26 cm, 180 pages ISBN : 978-2-35046-489-3 25€ https://www.filigranes.com/livre/lapres-jour/ A LIRE : Cinq histoires de famille Entretien avec Alexandra Bellamy Cinq histoires de famille Entretien avec Sylvie Hugues Cinq histoires de famille Entretien avec Rima Samman Cinq histoires de famille Entretien avec Catherine Poncin Marque-page0
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