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Le Champ des Impossibles.02 : Sylvie Meunier, Raconter des histoires

Temps de lecture estimé : 4mins

Sylvie Meunier travaille sur des photos, mais n’est pas photographe. Elle chine des photos anonymes dans des brocantes, mais ne se considère pas collectionneuse : « La photo, c’est une matière première » éclaire-t-elle. Difficile de catégoriser cette artiste, graphiste de formation, mais qui aime toucher à d’autres domaines artistiques – scénographie d’expos photo, écriture, sons…

L’exposition qui lui est consacrée dans le cadre du Champ des Impossibles.02, est tirée d’un projet plus large : « Au départ, il y a l’idée d’un livre – « Mister K »* – qui entremêle photos et écrits, explique-t-elle. Les mots et les photos ont la même valeur, se complètent, se répondent, s’infusent. L’un n’illustre pas l’autre. Il s’agit d’une forme de roman-photo qui combine des photos chinées dans des brocantes américaines, ou parfois personnelles, et des écrits provenant de mes carnets de notes. Il raconte l’histoire d’un homme qui, à la fin des années 50, tourne le dos à sa vie d’avant et part sur les routes des États-Unis. Grâce à quelques flash-backs, on comprend petit à petit ce qui l’a poussé à se lancer dans ce road-movie. Mais entre ce dont il se souvient et ce qu’il imagine ou rêve, la frontière entre le réel et le fantasme reste fragile ».

Raconter des histoires
Depuis 2009, Sylvie Meunier travaille à partir de photos anonymes ou personnelles. Après le décès de son grand-père, agriculteur de la Vienne, elle récupère une boite à chaussures remplie de photos, qu’elle avait plaisir, enfant, à regarder avec son aïeul. Quelques mois plus tard, sa mère meurt et Sylvie Meunier, récupère, là encore, des photos de famille. « Parallèlement, fréquentant des magasins d’antiquités, je me rends compte que des familles vendent leurs propres photos ! Ils se dessaisissent ainsi de leur mémoire familiale. Je commence à en acheter, sans but précis, mais avec le goût de recréer l’histoire de ces inconnus. Je prends conscience que ces photos d’anonymes me renvoient à mes propres photos de famille. La photographie de famille est très normée : souvent les mêmes poses, les mêmes regards. Ces images forment en réalité notre mémoire collective. Les histoires familiales, au fond, disparaissent avec le temps. Je me les réapproprie pour les accompagner de ma propre narration ».

Portrait de Sylvie Meunier © Olivier Steigel

Possédant une bibliothèque entière de photos, Sylvie Meunier se sent, dans les brocantes, « au bon endroit, avec le bon matériel ». Elle imagine, tout d’abord, créer de petits livrets qui associent des images non retouchées, issues de différentes provenances. Elle fabrique également des jeux (7 familles, Memory games…). Avec le temps, l’écrit prend plus de place. « J’ai démarré avec des accumulations de photos. Puis j’ai ajouté des textes qui offrent une narration plus complexe. Mais le livre ne doit pas être un cadre figé : je peux exposer certaines photos qui n’y figurent pas, ajouter d’autres éléments (sonores par exemple). Il y a un fil conducteur : la route suivie par Mister K, mais je peux aussi en extirper des éléments pour alimenter un travail autonome. »

Sylvie Meunier utilise une technique d’impression particulière, la « piézographie », à base d’encres carbone aux pigments de charbon, qui offre une palette de noirs très étendue (9 niveaux de gris). Les photos sont imprimées sur du papier japonais « Kozo » de 40 grammes en fibre de mûrier. Les images assemblées en série n’ont, au départ, aucun rapport entre elles et ne sont pas issues des mêmes lots. C’est leur agencement et d’éventuels traitements (recadrage, superposition) qui donne le fil de l’histoire.

INFORMATIONS PRATIQUES

ven04jui10 h 00 mindim04jul18 h 00 minLe Champ des ImpossiblesParcours Art et Patrimoine en Perche .02Moulin Blanchard, 11 Rue de Courboyer 61340 Perche-en-Nocé


Dans le cadre du Champ des Impossibles.02, Sylvie Meunier expose au restaurant « Après l’Ecole » à Saint-Cyr-la-Rosière, tous les week-ends de 14 à 18h30.
Infos : www.lechampdesimpossibles.com

Emmanuel Berck
Après une trentaine d’années dans la communication et la traduction, majoritairement dans le secteur des nouvelles technologies, Emmanuel Berck est devenu rédacteur indépendant en 2019. Il accompagne ainsi des entreprises dans l’élaboration de leurs stratégies éditoriales, à travers la rédaction de tribunes libres, de témoignages clients ou d’articles destinés à la presse. Il développe parallèlement une activité de pigiste pour différents magazines locaux ou nationaux, comme « Pays du Perche », « Pando » et « Profession Photographe ». Ses thèmes de prédilection sont l’environnement et la transition agricole, l’évolution climatique et la préservation de la biodiversité, et les enjeux liés à l’alimentation en circuits courts. Installé dans le Perche depuis 20 ans, il s’appuie sur un réseau d’acteurs locaux très divers qui lui permet d’analyser en profondeur les problématiques qu’il traite dans ses articles. Il aime en outre rédiger des portraits mettant en relief le travail de l’artiste ou l’artisan – le geste et les outils – son savoir-faire, son parcours et ses préoccupations actuelles. Emmanuel a réalisé 11 portraits d’artistes du Champ des impossibles.02, publiés dans l’hebdomadaire « Le Perche » durant l’été 2021. Il a également écrit deux entretiens avec deux artistes du Champ des impossibles, à paraître aux Editions Filigrane.

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