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Partager Partager L'Invité·e Carte blanche Sadreddine Arezki : Police coloniale, visuels coloniaux La Rédaction23 septembre 2020 Temps de lecture estimé : 4minsPour sa deuxième carte blanche, notre invité de la semaine, Sadreddine Arezki, poursuit son decryptage de l’usage photographique dans la lignée de sa précédente titrée « Corps noirs dans les manifs », voici « Police coloniale, visuels coloniaux ». Retour sur la campagne de communication lancée par la Police pour répondre aux accusations de racisme et de violence… Vous l’aurez compris, je suis fasciné par le destin de certaines images. Celles historiques, dont le sens excède la somme des éléments qui la composent. Des images à tiroirs pourrait-on dire tant elle recouvre plusieurs notions : histoire, esthétique, politique et idéologique, tout cela actualisé dans les remous du bain de l’information. Ainsi, la fin du règne du président Bouteflika en Algérie a été une longue et lente agonie qui a été balayée par les manifestations qu’ont connues les villes algériennes depuis début 2019 et jusqu’à l’irruption du virus mortel qui a tout stoppé, non pas la démocratie, je parle du Covid-19. Durant l’un de ces jours de manifestations à Alger, la police algérienne a été accusée d’avoir embarqué des manifestantes puis de les avoir dénudées dans un commissariat de la banlieue d’Alger. Odieuse répétition d’un procédé qui fonctionne sur l’humiliation de l’autre. Pour manifester son soutien aux femmes violentées par la police, cette femme brandit une pancarte reproduisant une image réalisée par Marc Garanger au sein de l’armée française coloniale durant la guerre d’Algérie. Un simple renvoi à l’histoire ? Sur la pancarte, la manifestante s’interroge, police coloniale ? Pourquoi avez-vous dénudé une manifestante dans l’enceinte du commissariat. Curieux destin d’une image, d’abord réalisée afin d’instituer un état civil des indigènes, ses conditions de réalisation ont ensuite été dénoncées par l’auteur même de l’image. Puis, Cette image a parfois été sur ou mal interprétée en raison de l’air de défi qu’arborent dessus les femmes algériennes obligées de se dévoiler par la force. Photo postée sur facebook : Hamdi Baala. Avril 2019 à Alger Tantôt, ces images étaient coloniales ou anti coloniales. Tantôt elles étaient abjectes parce qu’elles étaient réalisées par un militaire français. Tantôt, elles étaient formidables parce que justement elles témoignaient de l’abjection coloniale. Cette image coloniale sert aujourd’hui à dénoncer une action ignoble réalisée quelques dizaines d’années plus tard par la police nationale. Un viol symbolique du corps de la femme s’est déroulé dans un commissariat algérien. Cette manifestante établit un parallèle entre ces deux usages de la force similaires. Le sens de cette image est actualisé et affiné. Cette appropriation crée aussi un raccourci sidérant basé sur un motif identique de l’agression lâche et humiliante à l’égard des femmes, action commune à une armée coloniale et une police factieuse et non républicaine. Une violence de dominants. Plus près de nous dans le temps et dans l’espace ; à la suite d’importantes mobilisations citoyennes réclamant la fin de l’impunité pour les auteurs de violences policières, en juin dernier, la police s’est lancée dans une entreprise de communication afin de redorer son blason et répondre aux accusations de racisme et de violence qui la visait. Pour ce faire, elle a organisé dans plusieurs villes comme Bayonne, Roubaix où comme ici à Saint-Denis, des opérations de distribution de bonbons aux populations locales et notamment les enfants. Les enfants étaient ravis. Ironie de l’histoire, ce type d’actions a été théorisée par l’armée coloniale en Algérie. Pour mater la contre insurrection et s’attacher la loyauté des indigènes, l’armée maniait la carotte et le bâton. Les distributions de bonbons succédaient aux opérations de pacification qui n’avait rien de cordial. Ces techniques ont été utilisées par différentes forces armées, les militaires français et américains y ont eu aussi recours lors d’opérations en Afghanistan. Juxtaposer les périodes différentes est toujours délicat, néanmoins l’effet de rappel historique est ici assez désastreux alors que justement c’est une forme de racisme corollaire au colonialisme qu’il s’agit de combattre. Surtout quand l’acteur de ces images prétend justement lutter contre des accusations de racisme. A VOIR : Des policiers distribuent des bonbons, notamment à Bayonne et à Saint-Denis, pour redorer leur image auprès de la population Le Sgt. Juan Almaguer, infirmier de la Compagnie A, 1er Bataillon, 67e régiment de blindés, 2e Brigade Combat Team, 4e Division d’infanterie, les mains des bonbons aux enfants afghans lors d’une patrouille à l’extérieur des portes de poste de combat Légende de l’image en dernière page d’un livre hommage à l’action des SAS en Algérie : distribution de bonbons, la dernière du Lieutenant Tumoine. Chef de là SAS de M’raou Battoum, quelques heures plus tard sa voiture sautait sur une mine le 5/01/1959. Marque-page0
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