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ArtVivantOtherSide Ann Van Der Broeck : Noir comme l’innocence Marjory Duprés16 mars 2017 Partager Partager Temps de lecture estimé : 3minsThe Black Piece, de la chorégraphe belge Ann van der Broeck, joué du du 9 au 11 mars 2017 au Théâtre de la Cité internationale, plonge les spectateurs dans le noir. Du concert rock au film macabre, les registres se fondent dans un univers grisé, quasi infra-rouge, qui déconcerte. On en ressort groggy, comme après une nuit où l’on aurait tout oublié, sauf quelques inquiétants flash-backs. Enquête ou métaphore, le propos sur la noirceur, inspiré par l’histoire des couleurs de Pastoureau, fait se côtoyer un dispositif expérimental (éclairage en temps réel et à la lampe torche, captation vidéo-projetée de scènes sur le plateau…) et une danse dégingandée et trépidante. Les débuts du spectacle installent une ambiance de traque. Une caméra dont le mouvement est perceptible grâce à un cercle lumineux éclaire des fragments du plateau. Avec un rendu aléatoire et une déambulation très orchestrée, le plateau se transforme en un espace fantomatique. Apparitions et disparitions. On imagine sans mal une forêt, un vieil hangar ou une maison abandonnée. On ne sait pas combien ils sont. S’il y a des victimes. Ou s’il sont juste bourrés. Pieds en fuite, objets fétiches, ombre rampante, visage blême, on oscille entre Paranormal Activity et David Lynch. Cette introduction laisse place à un dialogue mi glamour, mi macabre entre l’écran et les corps. La chorégraphe éclaire les cinq interprètes à la lampe torche, avalant les ombres, arrachant à la pénombre certaines parties de leur corps. Leur danse sonore ne s’arrête qu’à la faveur de provocations narcissiques face caméra : anges déchus, tour à tour des avatars de Nick Cave, Janis Joplin ou Iggy Pop qui jouent à briller. Cette recherche permanente de l’état « limite » fait que la danse devient scansion répétitive, cinglante répondant à l’imaginaire rodé de la rock star. Mais derrière cette mécanique des apparences, la chorégraphe cherche à toucher l’endroit où l’on se dépossède et où l’on ne s’interdit pas d’être…ailleurs. Cette sourde étrangeté, ce décalage marqué et permanent entre les personnages et la vision forment la puissance expérimentale de The Black Piece. Qu’est ce qu’on lâche dans le noir ? Les chiens ? La flemme ? La peur ? La censure ? L’expression « dark and free », reprise comme une litanie, chantée, susurrée, ne donne aucune réponse tant c’est une aspiration mouvante ou mouvementée. La liberté comme errance, la liberté comme lutte, la liberté comme évasion. On pardonne alors l’aspect millimétré, spectaculaire de la chorégraphie portée par la beauté plastique des interprètes, dont on aimerait qu’ils soient un peu imparfaits. Au moment où les présences se démultiplient, ou la danse se propage dans d’autres corps à partir de danses dans le noir montrées à l’écran. Au moment où apparaît la spontanéité d’un enfant. On suspend un peu le jugement, et là, on se dit qu’il est ténu le fil du sombre, fragile la balance des noirs, et que tout s’enracine dans l’oubli propre à l’enfance. En chacun de nous, tout cela à la fois. Noir comme l’innocence. The Black Piece de Ann Van Der Broeck Du 9 au 11 mars 2017 Théâtre de la Cité internationale 17 Boulevard Jourdan 75014 Paris http://www.theatredelacite.com Marque-page0
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